LE GILLES EN BLANC
I
Gilles-Cœur est dans la plaine et regarde devant lui : C’est un fleuve qui coule et n’a rien à lui dire, là, au bas de la plaine — et là-haut, c’est un cerf-volant.
— Ah ! Cerf-volant, dit Gilles-Cœur, je ne puis pas voir le fil qui te tient… Il ne tient qu’à un fil aussi, que je t’aperçoive sans doute, mais où le prendrai-je si je ne l’ai pas ? — Et toi, si tu brisas le tien d’un trop brillant effort… Ah ! pauvre, pourquoi faire ?…
C’était au très, très petit jour, lisse et gris comme un voile d’eau répandu sur les molles terres… une atmosphère de regret — le sommeil réveillé par aucun bruit mais sa lassitude elle-même. La plaine, où Gilles-Cœur, parce qu’il était triste oublia de rentrer chez lui et pensait en propres accents tous les grands vers désespérés de son poète, cet « interminable ennui » s’étrécissait à mesure, tandis que la nuit mourait.
« — Ah, pauvre, disait Gilles-Cœur, je vois ta queue serpentine et tous tes petits papiers… Cerf-volant, tu planes, planes, et tu es seul sur ma tête où ne brillent plus d’étoiles.