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notre planète

siles de silex éclatés ou taillés. C’est l’âge paléolithique, suivi de l’âge néolithique (pierre polie), après quoi l’extraction des métaux préparera de nouvelles assises pour des organisations d’humanité. La suite sera de l’histoire proprement dite, c’est-à-dire d’une progression d’enchaînements où la lumière pourra jaillir de chocs d’obscurités, avec le temps[1].

L’épaisseur des terrains, impliquant la durée de leur formation, assigne a chacun d’eux une très grande inégalité d’emprise sur les temps requis pour arriver jusqu’à l’état présent. Après les sédiments archéens dont l’épaisseur est sensiblement égale à celle de tous les terrains fossilifères, l’ère primaire fut incomparablement la plus longue. L’ère quaternaire, relativement la plus brève. De l’une à l’autre, à mesure qu’on monte vers la surface, c’est une gradation de moindres durées pour des intensités croissantes d’évolutions organiques. Le contraste est frappant de la première couche du quaternaire à la plus récente, où l’homme (venu peut-être du tertiaire) se présente avec ses ossements fossiles et ses outils[2].

Perfectionnement d’un art n’implique pas de nécessité perfectionnement simultané sur d’autres points. Les peintures des

  1. On a beaucoup écrit sur l’âge de la terre. Pour réaliser la salure des mers par les apports fluviaux, on demande au moins cent millions d’années. J’en donnerais volontiers davantage. Le calcul fondé sur l’éventuelle durée des stratifications sédimentaires, nous promène de cent millions à mille millions d’années. Ne marchandons ni le temps ni l’espace. En 1886, M. R…, professeur d’histoire à l’École polytechnique, fondait encore ses cours sur un manuel dont il était l’auteur et qui commençait en ces termes : 3963. — Création du monde. 2292. — Le Déluge, etc. L’estimation, selon le cours apparent de la radio-activité, nous conduit jusqu’à quatorze et seize cents millions d’années. L’étude des plissements terrestres en suggère deux mille millions. On s’accorde à ne pas dépasser ce chiffre. Cela suffit pour une sensation d’incommensurable durée. Combien fâcheux que la « Révélation » biblique ne nous ait pas dit un mot de cette merveilleuse histoire !
  2. On estime qu’une dizaine de milliers d’années ont pu s’écouler depuis le dernier âge du quaternaire. Aujourd’hui, les changements de la surface terrestre, quoique réels, sont inappréciables pour nous. Quel nombre de siècles faut-il donc’attribuer à l’ère quaternaire elle-même qui subit de si graves modifications ? Et de l’épaisseur du quaternaire, à peu près négligeable au regard du tertiaire, du secondaire, surtout du primaire. Et des dépôts antérieurs, dits archéens, quelles inductions de durée ?