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et après ?

des nuées ? Nous montrer dignes de notre destinée sous le regard de tous, sans rien attendre de l’absolu qui nous ignore, faute de pouvoir descendre jusqu’à nous. Renoncer à nous en imposer les uns aux autres. Entreprendre de nous montrer forts, sans en concevoir d’autre orgueil que de nous être trouvés faibles, et, cependant, d’avoir grandi, d’avoir voulu, d’avoir fait.

Le jour vient, laborieux mais inévitable, où doit s’accomplir par la simple évolution de la connaissance, le plus beau, le plus complet d’un développement humain qui nous convie aux collaborations exigées du Cosmos. Il n’est que de renoncer aux mirages célestes de l’énergie divinement personnifiée pour installer l’homme, fragile et fort, dans sa puissance positive de connaître, seule capable de le réaliser.

— Maître, s’écriait le disciple, quel est ce Dieu brillant de majestueuse splendeur que je découvre au delà des nuages ? Ne vous semble-t-il pas qu’il m’appelle ?

Et le Bouddha, souriant, de répondre :

— C’est toi-même, ô mon fils.

N’est-ce pas l’aventure de l’enfant qui cherche la figure au delà du miroir ? L’enfant peut apprendre. Pourquoi l’homme qui se cherche à son tour, et qui est en voie de se trouver, n’achèverait-il pas, de plein vol, la haute conquête de lui-même par l’acceptation émotive de sa destinée ?

Dans cet état d’esprit, affranchi du monde et de moi-même, que mon dernier mouvement de présomption soit d’apporter ici la parole indépendante d’un passant, au soir de la pensée.

FIN