Page:Clemenceau - Au soir de la pensée, 1927, Tome 2.djvu/341

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
336
au soir de la pensée

Dans nos cavernes, peu de figures humaines. Des profils linéaires souvent déformés, des femmes en des attitudes peut-être rituelles, mais d’un réalisme acharné qui paraît se complaire en une absence d’esthétique d’où il était difficile de prévoir que sortirait la Vénus de Milo. Des hommes schématiques en des formes où le schéma s’affranchit trop librement de la réalité – étrange défaillance d’une observation parfois si aiguë. Pourquoi tant d’attention à l’élément animal, et si peu aux figurations d’humanité ? Sur quelque durée de temps que ce soit développé l’art quaternaire, l’incroyable contraste du minutieux fini qui caractérise certaines formes animales avec l’imprécision des images humaines, me paraît très favorable à l’idée d’un symbolisme mythique de la bête fétiche (totem) dominant l’homme, vulgaire adorateur. L’artiste a dû contempler les animations de la nature avant de chercher à s’y reconnaître. Et puis, la grâce féminine ne réclamait pas encore un autre miroir que celui du prochain ruisseau. Il faudrait peut-être voir des rites cultuels du chasseur dans les images où les batailles de l’homme et de la bête sont représentées. Cette période dut s’accommoder d’autres rites dont quelques-uns ont persisté, comme le prouve la danse ithyphallique de nos dames quaternaires.

À noter qu’on ne trouve point de tableaux de batailles entre les humains. Ce n’est pas que le modèle ait pu faire défaut. Allez vous convaincre à Versailles que la tradition des combats sans peintures ne s’est pas continuée.

Enfin, nous découvrons de rares représentations du soleil (un cercle rayonnant) et de la lune, qui annoncent une fixation de l’esprit sur le monde céleste, et le besoin, pour quelque hommage, de le représenter. Premier signe symbolique d’un développement émotif qui deviendra l’activité des cultes en gestation. Jusqu’ici, rien du feu dont l’homme devait déjà disposer.

Avec les images paléolithiques, nous serions, a-t-on remarqué, à l’origine des religions humaines. Je dirais plutôt des magies rituelles, car de ces images aux premiers gestes religieux, un fort long temps dut s’écouler. Les empreintes du siège et des talons demeurées inscrites sur le sol argileux dénoncent la réunion d’une assistance pour quelque cérémonie. Quant à considérer,