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l’atome

millième de millimètre, est déviée de sa course cinq milliards de fois par seconde. Il y en a trente milliards de milliards dans un centimètre cube d’air. Il en faut ranger 3 millions en files rectilignes pour faire un millimètre ».

De ces nouveaux points de vue, si différents de la simplicité que cherchait l’ancien atomisme, nous trouvons l’atome moderne d’une insondable complexité. Chaque nouvelle découverte de la physique nous révèle une nouvelle complication de l’atome. Il n’était même besoin que de la juste position du problème pour nous faire comprendre d’avance qu’il n’en pouvait être autrement.

La radio-activité n’est-elle donc qu’une désagrégation de l’atome en atomes plus petits, électrons négatifs gravitant, à la manière des planètes, autour d’un gros noyau positif qui joue, dans ce système, le rôle de notre soleil ? Cela ne paraît pas contesté. L’attraction mutuelle des électricités contraires fait la cohésion du système dont elle règle les périodes, etc… On rencontre encore des électrons vaguant d’eux-mêmes comme les comètes d’un système stellaire à l’autre, et établissant peut-être, entre les systèmes éloignés, un libre échange d’ « énergie ». Ils obéissent, nous dit-on, aux mêmes lois cinétiques que les molécules gazeuses toujours en mouvement, qui rendraient ainsi les métaux conducteurs.

Après l’électron dit « atome d’électricité », survient le « magnéton » de M. Pierre Weiss, ou « atome de magnétisme » auquel nous aboutissons par l’observation des corps magnétiques et par l’étude du spectre des corps simples. Et voici que les raies du spectre se répartissent en séries, « obéissant chacune à des lois qui les rapprochent des harmoniques »… Sur quoi, M. Henri Poincaré, imperturbable, poursuit son chemin : « Pourquoi des atomes d’hydrogène peuvent-ils donner plusieurs raies ?… C’est qu’il y a plusieurs atomes d’hydrogène différant entre eux par le nombre des magnétons qui y sont alignés, et que chacune de ces espèces d’atomes donne une raie différente… Un magnéton serait un tourbillon d’électrons, et voilà notre atome qui se complique de plus en plus. »

On m’excusera de ne pas suivre si loin le maître qui s’engage de plus en plus dans les problèmes de la thermodynamique interne de l’atome, « lequel n’a aucune tendance à se mettre en équilibre avec la température extérieure. »