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s’instruit à son tour (par l’ « habitude » lamarckienne) dans les procédures de feintes qui lui permettent quelquefois d’échapper. En des mesures diverses, les progressions pourront varier suivant les aptitudes de races ou d’individus. Variables encore au suprême degré, dans la race ou dans l’individu, les possibilités de fixations héréditaires. Que l’évolution du poursuivant ou du poursuivi donne à l’un des deux un trop grand avantage, l’un des deux devra disparaître, remplacé par des existences mieux douées pour l’attaque ou pour la défense. Les spectacles généraux du monde n’en seront pas sensiblement changés.

Sous ce titre : la Naissance de l’intelligence, M. Georges Bohn a publié un volume où se résume une consciencieuse exposition des premières vues, à ce jour, d’une psychologie comparée.

Les remarquables recherches de Réaumur sur la vie des abeilles avaient annoncé l’ouverture de la laborieuse tranchée. Georges Leroy, bientôt, s’y engagea résolument par ses Lettres philosophiques sur l’intelligence et la perfectibilité des animaux. Frédéric Cuvier lui-même allait le suivre en accordant, de confiance, à l’orang-outang « la faculté de généraliser ». Il ne s’agissait pas encore d’observations, ou même d’hypothèses, liées dans la ligne ascendante des formations animales jusqu’aux évolutions d’humanité.

Ici s’affirme encore hautement la maîtrise de Lamarck, à qui M. Georges Bohn rend hautement l’hommage qui lui est dû. Sur les évolutions du système nerveux dans la série animale, Lamarck, d’une main sûre, avait dès l’abord tracé les lignes de repère. De déterminer avec quelque précision où commencent l’intelligence et la volonté, je n’en fais point mon affaire, car je crains fort que ce soit surtout une question de mots. Si l’amibe se déforme pour atteindre sa proie, par un acte de choix caractérisé, je ne crois pas du tout que la science commande de lui refuser la « volonté ». Si je ne me sers pas de ce mot pour caractériser les mouvements de la plante, c’est qu’il n’est pas admis par un commun usage qui s’attache moins aux similitudes qu’aux différences toujours frappantes.

La réaction sensible, d’origine physico-chimique, se fait en motricité aussi bien dans l’atome que dans les astres sensibles à l’interaction de toutes masses sidérales, comment qu’elles soient distribuées : voilà le point. capital dans notre interprétation posi-