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l’évolution

loppement de l’énergie, le cycle de l’évolution doit s’achever.

Quant à l’hérédité des caractères acquis, elle parut inévitablement à Lamarck si peu susceptible d’être contestée, qu’il se borna à en prendre acte comme d’un phénomène hors du débat. Il est certain que si le principe des transmissions héréditaires n’était pas admis, l’évolution serait un mot dépourvu de sens. Il nous faudrait retourner aux espèces séparées de Cuvier. Cruel dilemme quand nous avons tous les jours sous les yeux les témoignages accablants de toutes formes d’hérédités nécessairement acquises au cours du développement organique. Et pour ce qui est de distinguer entre les hérédités récemment acquises et les phénomènes de la primitivité, les néo-darwiniens qui s’engagent dans cette distinction ne l’ont pas encore justifiée.

L’homme serait encore à l’état « inorganique » si les ondes d’énergies cosmiques n’avaient, à tout instant, la puissance organique de dépasser les lignes des formations qui les ont engendrées. C’est le développement du Cosmos. Hors de quoi, nous devrions répudier, contre l’évidence, l’enchaînement des organismes révélés par les fossiles, et leurs filiations, pour revenir à la Genèse de Moïse qui se passe très bien de distinctions d’hérédités acquises ou immuablement transmises puisqu’elle consiste à ne pas tenir compte des « faits ».

De surabondants exemples de transmissions par hérédité des caractères acquis, on en trouvera partout. L’hérédité des habitudes éclate à tous les yeux dans toutes les formes des activités de la vie. D’autre part, les mesures de durées géologiques que nous possédons aujourd’hui nous permettent d’attribuer aux phénomènes du transformisme les temps qui leur sont indispensables, tandis que ceux qui veulent précipiter l’événement s’étonnent de ne le point rencontrer quand ils lui refusent la condition première de ses manifestations. N’est-il pas remarquable, pour ne citer qu’un cas, que chez les fourmis adonnées à la culture de champignonnières, la taille des individus ouvriers

    lement connu, d’expérience, que les premières réactions cutanées aux radiations de la lumière déterminent de véritables activités de vision, dans l’ordre des protozoaires. Si l’organisation de l’œil nous est donnée pour un miracle de finalité, la merveille de sa formation progressive me paraît, en l’absence d’un dessein préconçu, un miracle de qualité supérieure, puisque nous en pouvons suivre genèse et détermination.