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au soir de la pensée

gager dans l’intimité des voies nouvelles, obtiendra d’émouvantes satisfactions des belles études de M. jean Perrin sur les atomes. J’ai parlé du rideau d’inconnu qui se déchire. Mieux encore. Une éblouissante construction des mouvements élémentaires apparaît, qui nous émerveille d’une féerie de positivité — ce que la présomptueuse théologie elle-même s’est trouvée hors d’état d’accomplir. On sait en quels détours de magies le divin Protée essayait vainement de se dérober. Le héros grec, persévérant, réussit à le vaincre. À l’homme, anxieux de savoir, le Dieu doit se résoudre à livrer son secret.

Ce secret, il faut le chercher dans l’inextricable complexité des rencontres d’ondes vibratoires, où nous voyons se propager des phénomènes de résonnances semblables à ceux du diapason. « L’énergie moyenne des oscillations, nous dit Planck, devient extrêmement petite quand la fréquence devient très grande… L’énergie d’oscillation doit être ce qu’elle serait si elle était seulement entretenue par les chocs de molécules… et le calcul démontre que l’énergie de chaque oscillateur varie de façon discontinue. » Planck a supposé qu’elle varie par quanta égaux, en sorte que chaque oscillateur contient toujours son nombre entier d’atomes d’énergie, ou, si vous aimez mieux, de « grains d’énergie »[1]. Einstein, procédant, veut que, « dans un corps solide, chaque atome soit sollicité vers sa position d’équilibre par des forces élastiques, en sorte que, s’il en est un peu écarté, il vibre avec une période déterminée » — d’où le phénomène profond de la résonnance universelle qui ferait les coordinations du Cosmos. Même, selon Einstein, « les propriétés élastiques des corps solides donnent un moyen de prévoir la fréquence des vibrations d’un atome écarté de sa position d’équilibre ».

Je signale encore, au passage, les chapitres de M. Jean Perrin sur la discontinuité des vitesses de rotation, sur la distribution de la substance dans l’atome et dans la molécule, pour aboutir à cette formule qui nous tient en suspens : « La plus faible vitesse de rotation stable correspond à plus d’un milliard de tours en un cent millième de seconde »[2]. Après cela, il ne nous reste plus,

  1. Jean Perrin.
  2. N’oublions pas que le mouvement des projectiles atomiques, comme de nos planètes, est à la fois de translation et de rotation.