Page:Clemenceau - Au soir de la pensée, 1927, Tome 2.djvu/144

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
139
l’évolution

sique ont dit tout ce qu’elles avaient à dire, et ne peuvent que se répéter. En regard de quoi, nous avons vu et nous voyons, chaque jour, s’accroître la merveilleuse pénétration de nos investigations positives. Comparaissez, abstracteurs de transcendances, et montrez ce que nous ont apporté, de connaissances vérifiées par l’expérience, vos envolées d’imagination. Nous vous opposerons le merveilleux tableau, chaque jour grandissant, d’une observation contrôlée. Le seul phénomène de la gravitation universelle suffit à découvrir les réactions de sensibilité des individualités astrales, confirmées par les sensibilités correspondantes des électrons dans l’atome.

Les surprises de l’analyse spectrale n’en sont qu’à leur début. Nous avons droit à l’audace d’aspirations nouvelles. Il ne s’offre aucun signe que nos procédures d’investigation soient en voie de s’épuiser. Loin de là, nos instruments d’analyse deviennent chaque jour d’une plus pénétrante acuité, et de nouvelles procédures se découvrent devant lesquelles nos plus grands génies n’auraient pu se défendre d’un éblouissement. Pendant que tous nos verres incessamment braqués sur l’horizon, en sentinelles avancées du connaître, guettent le moindre signe de quelque passage appelant une interprétation nouvelle, l’univers, en ses évolutions déterminées d’astres aussi bien que d’atomes, se laisse surprendre au cours de cycles où les éléments ne se séparent que pour se rejoindre en d’éternelles successions de durée et d’étendue.

Il se peut que cela nous plaise. Il se peut que cela dérange nos partis-pris. La gravitation, reconnue, ne nous doit pas de comptes, et nous devons des comptes à la gravitation. Lancés dans la direction de Véga, nous n’arriverons pas, puisqu’il n’y a pas d’arrêt. Nous aurons voyagé, passé, et, par les vitres des choses, nous aurons senti, vu, connu, des étincelles d’infini. Quoi que nous puissions dire et faire, cela a été, cela est, cela sera, cela continuera d’être. En aucun point, en nul moment, l’élan de la connaissance, qui est l’élan de vivre, ne peut être arrêté que par la dissociation de nous-memes imposée à tous, consentie ou même recherchée par quelques-uns. Car, si nous ne pouvons nous empêcher de naître, seuls dans l’univers nous avons le pouvoir d’interrompre le cours de notre destinée. À l’heure qu’il nous plait de marquer, nous sommes en posses-