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l’évolution

solaire ne s’épuisera-t-elle pas quelque jour ? On sait que la majeure partie en échappe aux planètes elles-mêmes pour se perdre « dans les espaces inconnus de l’univers glacé ». On a calculé que l’astre perd annuellement deux degrés de sa température. La température de la surface étant de 7 000 degrés, le soleil devrait être refroidi depuis longtemps. S’il n’en est rien, « c’est qu’il doit se trouver un côté recettes sensiblement équivalent. » Les théories n’ont pas manqué. Je ne vais point m’engager dans ce débat. Nos innombrables étoiles (un milliard pour la Voie Lactée) sont autant de soleils, plus ou moins chauds selon leur coloration blanche, jaune ou rouge. Le spectroscope nous permet une étude féconde de leurs phénomènes chimiques, et nous en avons tiré d’importantes clartés sur la constitution élémentaire de l’astre en ses divers états.

On évalue à 6000 degrés la température moyenne du soleil, ce qui suffirait pour alimenter, pendant 3 millions d’années, le rayonnement calorifique tel que nous pouvons l’observer. Ce n’est rien encore. Projetés du centre à la circonférence, les fragments se décomposent instantanément à la manière de nos explosifs, avec une énorme libération de chaleur. Arrhénius nous affirme que cela peut suffire pour alimenter le soleil « pendant 4 000 millions d’années » et peut-être beaucoup plus encore, probablement même jusqu’à plusieurs billions d’années. Il me paraît aventureux de discuter sur de pareilles échéances, surtout quand on ne peut pas encore préciser suffisamment le point de départ de la formation solaire. On est généralement d’accord pour reconnaître qu’il y a une échéance. Cela suffit pour des inductions d’avenir.

Voici donc le soleil en cours de refroidissement. En quelles formes d’amoindrissements les organismes de notre vie planétaire en devront-ils quelque jour s’en trouver affectés ? Ce ne peut être ici qu’une question secondaire. Le monde ne se découvrant à nous qu’en des alternances de températures, le fâcheux refroidissement, qui mettrait fin à l’existence de notre postérité, retrouverait, dans le cycle cosmique des évolutions successives, les passages de coordinations qui feraient retourner, en des temps incalculables, la matière cosmique de l’état concentré de soleils éteints aux extrêmes dispersions de la nébuleuse, génératrice de nouveaux soleils. Cela par des chocs d’astres inévitables, qui