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l’évolution

positivité supposées constantes en tous points de l’espace et du temps — nous nous trouverons toujours, de connaissance en connaissance, fatalement engagés dans des déterminations inductives qui nous paraissent fort au delà de ce qui pouvait être prévu. Avec la si remarquable étude de M. jean Perrin sur les atomes, je ne connais pas d’ouvrage plus propre à nous ouvrir l’esprit sur ces matières que l’Évolution des mondes du célèbre professeur Arrhénius.

Eh oui, l’évolution des mondes ! C’est logiquement par ce problème que la postérité du pithécanthrope aurait pu commencer son enquête, puisque le mouvement des astres est ce qui dut la frapper d’abord. Or, voici qu’après tant de mythiques détours, c’est à cet apparent point de départ que notre investigation positive du Cosmos doit inévitablement remonter. Quel est donc le tableau qui s’offre à nos regards, à notre recherche méthodique, et comment l’aborder ?

De toutes parts, aux étendues de l’espace, des projectiles embrasés, de tous ordres et de toutes mesures en d’éternelles révolutions qui se succèdent et s’enchaînent dans des cycles d’infinité. Des poussières cosmiques imperceptibles, repoussées des soleils et des étoiles en masses incalculables ; liaisons des soleils monstrueux aux nébuleuses démesurées ; des vertigineux systèmes solaires, avec leur cortège de planètes vivantes ; des profusions d’étoiles blanches, jaunes ou rouges, selon l’âge, à travers des champs d’astres morts, livrés au hasard des rencontres (comme dans le cas de la Nova Persœi) ; la déconcertante diffusion des brumes lumineuses qui sont les nébuleuses ; les lueurs palpitantes de perpétuelles lapidations de météores qui s’échappent d’un monde à l’autre dans des tempêtes de flammes volatilisées ; des comètes de toutes dimensions ; des étoiles filantes[1] ; des aurores boréales balançant des voiles de lumières ; l’éblouissement des voies lactées, cependant que notre planète éteinte tremble de ses volcans, charrie le feu de ses laves, bouleverse les rivages de ses raz-de-marées et couronne ce dévergondage ordonné des splendeurs de la vie : le sentiment et la pensée. Il faut des relations déterminées entre ces phéno-

  1. Vingt mille tonnes de météores, ou d’étoiles filantes, tombent annuellement sur la terre.