Page:Clemenceau - Au soir de la pensée, 1927, Tome 1.djvu/220

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
213
CONNAÎTRE

ou moins précises, c’est ce que voudra déterminer la psychologie positive. Superposées, ou plutôt imbriquées au cours de tout moment, les images seront tantôt plus ou moins confusément maintenues en des formations de méconnaissance, tantôt plus ou moins droitement ordonnées pour des accords de connaissance. Principalement, elles seront associées ou dissociées en des « complexes » organiques où s’échelonneront des déterminations de connaissances que nous dénommons « pensées ». C’est le domaine où vont se répandre les analyses et les synthèses de notre expérience sous les battements d’ailes de l’imagination en mal d’hypothèses.

Mais sommes-nous donc au bout du phénomène organique lorsque nous avons essayé de pénétrer jusqu’aux racines dans les formations de la connaissance ? En dehors de l’emploi que nous en pouvons faire, est-ce à dire que la conscience d’une rencontre de l’homme avec le monde extérieur épuise nos ressources de sensibilité ? je ne voudrais pas le soutenir.

S’il est entendu que toutes manifestations d’énergies mondiales, lumière en tête, sont près de se réduire à des modes d’électricité, — ce qui paraît nous conduire à l’unité d’énergie, — il ne reste plus qu’à savoir jusqu’où ces vibrations de l’univers peuvent affecter le récepteur humain qui n’est lui-même, et ne peut être, que d’ondes vibratoires à son tour. Dans l’océan des choses, des rencontres d’ondes ne peuvent que s’opposer, se pénétrer, ou s’accorder — ce dernier cas impliquant une conjugaison de développements. Rencontres d’inconscience et pénétrations d’activités organiques, pour l’apparition progressive, dans la série des êtres, d’une hyperesthésie de sensibilité, dite émotivité, achèveront ou voudront achever, après l’avoir originellement mis en marche, le phénomène du connaître dans le plein accord du contact parfait[1].

Car, si la sensibilité se trouve ainsi à l’origine de la connaissance, nous sentons, d’observation sur nous-mêmes, qu’elle ne cesse de la pénétrer, de la soutenir dans ses développements — même jusqu’à la dépasser. Insuffisamment contenues par des

  1. À rapprocher de cette remarque l’emploi du mot connaître dans la Bible pour exprimer l’union, la fusion complète des deux sexes. L’amour est, en effet, un phénomène de résonnance, une identification d’organismes.