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DÉMOSTHÈNE

tout un peuple animé, réconforté, aux heures de détresse dans le désarroi du plus noble idéal de pensée ? N’est-ce rien d’avoir fixé, pour un commun effort de grandeur, toutes ces âmes légères qui voyaient haut et se résignaient à vivre bassement sous le fer d’un dominateur ? N’est-ce rien de s’être révélé homme de vaillance et de volonté à la foule incertaine qui, cherchant un guide, et, le rencontrant, ne le reconnaissait pas ? N’est-ce rien d’être demeuré soi dans la ruée de ceux qui, pour une parodie de leur propre existence, ont besoin du fol assentiment de ceux qui se seraient sentis perdus s’ils avaient essayé de vivre d’eux-mêmes ? N’est-ce rien d’avoir visé au plus haut, fier de vouloir et de tenter, même si c’est trop demander de la destinée ? N’est-ce rien, après avoir parlé, d’avoir su se taire pour la suprême leçon de soi-même et d’autrui ? N’est-ce rien d’avoir conquis le pouvoir sans bassesses, de l’avoir exercé sans peur, et, après la défaite, d’avoir pu le quitter avec la vie sans remords, sans regrets ? N’est-ce rien de n’avoir jamais fléchi dans les tempêtes qui courbent trop de fronts ? N’est-ce rien d’avoir allumé et porté sans trembler le flambeau qui sera phare pour les générations à venir ? N’est-ce rien d’avoir voulu à travers tout, d’avoir aidé, encouragé des velléités de libération, réalisé des fragments du possible sans perdre le temps le plus