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DÉMOSTHÈNE

n’y aurait plus de soldats. Après ce magnifique effort, la légèreté athénienne demandait sa revanche. Ces mêmes hommes, qui venaient de combattre en héros, décidèrent que la guerre était finie, puisqu’ils étaient provisoirement vainqueurs, et pauvre figure aurait fait qui se serait refusé à rentrer chez lui. Quoi qu’il pût arriver désormais, le moral des troupes restantes était anéanti. Cratère rejoignait Antipater et la bataille de Cranon, suprême effort de l’Hellénisme, se trouva perdue aussitôt que livrée. C’en était fait. La Grèce, s’abandonnant en pleine victoire, avait à jamais perdu l’hégémonie intellectuelle que Rome hellénisée allait reprendre pour un temps, en des formes plus durables, mais trop fâcheusement exemptes de l’assouplissement athénien.

Les alliés se détachaient d’Athènes, détachée d’elle-même, qui s’avilit jusqu’à prononcer contre Démosthène une condamnation à mort. Cette fois, c’en était bien fini du héros de l’Hellénisme, vaincu par l’Hellade elle-même. La mort dans Athènes, la mort sous les coups d’Antipater, le choix n’importait guère. Cependant, le grand Athénien voulut bien épargner à sa ville l’acte d’abjection suprême. Réfugié dans le temple de Poseidon à Calaurie, il accueillit sans un tressaillement les soldats d’Antipater commandés par Archias, un homme à tout