Page:Clemenceau-Demosthene-1926.djvu/112

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
110
DÉMOSTHÈNE

de vie publique qu’elle avait entrevu sans avoir pu l’instituer ?

Il n’y avait plus qu’une question. Que vaudraient les Athéniens au moment décisif ? Hélas ! en trop d’occasions, ils avaient déjà prononcé sur eux-mêmes. Ils pouvaient rappeler Démosthène, — car, sans lui, ils étaient impuissants, — lui envoyer une trirème pour la pompe de ces cérémonies où excellent les peuples qui ont perdu le sens de l’action. Un vain bruit de paroles, quand l’heure demande le silence des suprêmes dévouements. Tout le peuple, bien entendu, s’est porté à sa rencontre, magistrats en tête, et ceux-là mêmes qui l’ont chassé ne sont pas les plus avares de leurs acclamations. On nous dit que Démosthène évoqua le souvenir du rappel d’Alcibiade en se félicitant d’une fortune supérieure. Peut-être y eut-il là quelque touche d’ironie. Alcibiade n’avait pas craint de porter les armes contre sa patrie. Démosthène avait été frappé, jusque dans son honneur, pour l’avoir uniquement servie.

Les événements vont se précipiter. Les généraux d’Alexandre se sont partagé les dépouilles du Maître, comme il était inévitable. Antipater a la Grèce dans son lot. Il n’est pas Alexandre. Mais les Athéniens ne sont plus les Athéniens des grands jours. Aujourd’hui encore il faut passer de la