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son maître, elle avait acheté plusieurs livres utiles, agréables et convenables aux femmes. Elle avait par là considérablement perfectionné son jugement et elle avait acquis un degré de politesse qui se trouve à peine chez les Africaines.

« Telle fut sa situation pendant plusieurs mois ; mais, malheureusement pour elle, son maître, ou plutôt son ami, qui n’avait jamais eu la petite vérole, attrapa cette maladie, qui lui devint si fatale qu’il paya le tribut de la nature. Harriot possédait une assez belle garde-robe et quelques bijoux ; elle avait toujours agi d’une manière si généreuse et si équitable qu’à la mort de son maître elle n’avait pas amassé en argent une somme de cinq livres sterling, quoiqu’elle eût pu, aisément et sans mystère, devenir la maîtresse de mille louis.

« La scène fut bientôt changée : de surintendante d’une table splendide, elle se trouva réduite à une très mince pitance, et même cette pitance n’aurait pas duré longtemps si elle n’eût pas avisé aux moyens de venir promptement au secours de ses finances presque épuisées.

« Nous ne pouvons pas supposer que Harriot eut quelques-uns de ces scrupules délicats et consciencieux qui constituent ce que l’on appelle ordinairement la chasteté et ce que d’autres nomment la vertu. Les filles de l’Europe, aussi bien que celles de l’Afrique, en connaissent rarement la signification dans leur état naturel. La nature dirigea toujours Harriot, quoiqu’elle eût lu des livres pieux et remplis de morale ; elle trouva qu’il était nécessaire de tirer un parti avantageux de ses charmes et, à cet effet, elle s’adressa à Lovejoy, pour qu’il la produisît convenablement en compagnie. Elle était, dans le vrai sens du mot, une figure tout à fait nouvelle pour la ville et un parfait phénomène de son espèce. Lovejoy dépêcha immédiatement un messager au lord S…, qui s’arracha aussitôt des bras de Miss Ry pour