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du génie à la guerre.

il est si fréquemment nécessaire de prendre de rapides déterminations. Enfin, si on dépouille cette expression du sens tantôt trop idéal et tantôt trop matériel qu’on lui accorde, le coup d’œil n’est autre chose que la prompte perception de la vérité dans des conditions où un esprit ordinaire ne la saurait entrevoir qu’à la suite d’un examen prolongé et après y avoir mûrement réfléchi.

Dans chaque cas particulier la résolution est un acte de courage, et, chez tout homme dont elle constitue l’un des traits du caractère, elle est une habitude de l’âme. Mais il ne s’agit pas ici, cela va sans dire, du courage matériel, du courage devant le danger physique, mais bien du courage de la responsabilité, c’est-à-dire en quelque sorte du courage de l’âme. On l’a souvent appelée aussi le courage de l’esprit, parce qu’elle procède de l’inspiration dirigée par l’intelligence. Cette dernière cependant ne la saurait produire seule, car on voit souvent les gens les plus intelligents manquer absolument de résolution. Il faut donc ici que l’intelligence éveille d’abord le sentiment du courage, puis qu’intelligence et courage marchent de pair et se soutiennent, car, lorsque les circonstances le pressent, l’homme est plus porté à se laisser guider par ses sentiments que par le raisonnement.


Nous croyons avoir ainsi démontré que, lorsqu’il y a insuffisance de motifs tangibles d’action, tout homme doué d’esprit de résolution échappe par cela même aux tourments du doute et aux dangers de l’hésitation. Par un raisonnement que rien ne justifie, on accorde cependant généralement la même vertu à la hardiesse, à la confiance en soi, à l’audace et à la témérité. Il y aurait pédanterie à discuter ici sur les mots, mais, pour prévenir de fausses objections, nous dirons seulement que