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du génie à la guerre.

une extrême énergie en arrive à compenser l’erreur commise dans la direction imprimée à l’action, dans la pluralité des cas le résultat moyen trahira néanmoins la faiblesse de l’intelligence dirigeante.


Il n’est pas d’activité humaine qui soit, autant que la guerre et par autant de côtés différents, en contact constant avec le hasard, et dans laquelle il convienne, par suite, de laisser une part aussi large à l’imprévu. Ce facteur étranger augmente l’incertitude de toutes les situations, il trouble sans cesse la marche des événements, et, par son immixtion constante dans l’action de la guerre, il fait que celui auquel en incombe la direction trouve toujours les choses différentes de ce qu’il les devait logiquement supposer, ce qui ne peut manquer d’exercer de l’influence sinon sur le plan conçu, du moins sur les détails de son exécution. Or, si cette influence est assez prononcée pour nous forcer à renoncer complètement à une partie de nos projets, il nous faut nécessairement aviser aussitôt à en former d’autres, opération pour laquelle, dans l’urgence du moment, nous manquons généralement de toute donnée immédiate, par la raison qu’au courant de l’action les conditions dans lesquelles elle se poursuit ne nous laissent pas le temps de réfléchir mûrement aux déterminations qu’il convient de prendre, et de les déduire de l’examen de l’ensemble des choses. Dans la majorité des cas, cependant, la connaissance des événements inattendus et les modifications qu’ils introduisent dans nos idées ne suffisent pas pour nous faire entièrement renoncer à nos projets, mais elles nous portent à ne les poursuivre qu’avec hésitation, et cela parce que chacun de ces événements n’arrive que successivement à notre connaissance, ce qui augmente encore le trouble et l’incertitude de nos résolutions et, si nous pouvons nous