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de la nature de la guerre.

2o  Le courage peut avoir pour mobile un motif positif tel que l’ambition, le patriotisme, les divers enthousiasmes. Le courage est alors un mouvement de l’âme, c’est un sentiment qui le produit, il est éventuel et contingent.

Ces deux sortes de courages produisent nécessairement des effets différents. Le premier est plus sûr parce que, une fois passé à l’état de seconde nature, il n’abandonne plus l’homme ; il a le caractère de la persévérance et laisse plus de liberté au jugement. Le second se rapproche davantage de la hardiesse et conduit parfois plus loin ; mais, s’il exalte parfois l’esprit, il l’aveugle souvent aussi. Réunis tous deux, ils constituent la forme de courage la plus parfaite.

La guerre est le domaine des privations, des souffrances et des efforts incessants. Pour ne pas succomber à ces causes délétères et pour les affronter avec indifférence, il faut à la fois posséder une force physique et une force morale considérables, et tout homme doué de ces qualités et d’un jugement sain constitue déjà, par cela seul, un solide instrument de guerre. Or ce sont précisément ces qualités que l’on trouve le plus généralement répandues dans les nations barbares ou à demi civilisées.

La guerre exige encore de ceux qui s’adonnent expressément à son activité un grand développement des forces de l’intelligence. En effet, les trois quarts des objets sur lesquels il faut baser l’action à la guerre restant toujours plus ou moins plongés dans les brouillards de l’incertitude, celui qui en a la direction a besoin d’une extrême pénétration d’esprit pour arriver à la découverte de la vérité par le tact seul de son jugement.

Que, de loin en loin et favorisé par le hasard, un esprit ordinaire perçoive la vérité, que, parfois encore,