Page:Clausewitz - Théorie de la grande guerre, IV.djvu/54

Cette page a été validée par deux contributeurs.
38
de la nature de la guerre.

la différence que, selon qu’il est de nature positive ou négative, le but politique introduit nécessairement dans la forme de l’action. Bien que ce soit là une question de la plus haute importance, ainsi que nous le ferons voir par la suite, nous devons ici nous maintenir à un point de vue plus général, par la raison que, précisément parce qu’elles subissent l’influence des résultats et des événements probables, les intentions politiques se modifient beaucoup au courant de la guerre, et en arrivent parfois même à devenir toutes différentes de ce qu’elles étaient à l’origine.

Il nous faut maintenant rechercher comment on peut agir sur la vraisemblance du résultat. C’est d’abord naturellement par les mêmes moyens que ceux auxquels on a recours pour renverser l’adversaire, c’est-à-dire par la destruction de sa force armée et la conquête de ses provinces. Ici, cependant, ces moyens ne présentent plus le même caractère. Il va de soi, en effet, que si en attaquant la force armée de l’ennemi nous nous proposons de la détruire entièrement, nous devons nous acharner après elle et la battre autant de fois qu’il est nécessaire pour arriver à ce résultat, tandis que si nous n’avons en vue que de lui ôter sa confiance en elle-même, de lui inspirer le sentiment de notre supériorité et de lui causer des craintes pour l’avenir, une seule victoire peut nous suffire sans que nous ayons à pousser plus loin l’acte de destruction. Il en est de même de la conquête des provinces ; dans le premier cas elle ne doit être normalement que la conséquence, la suite de la destruction de la force armée, et, s’il arrive qu’elle la précède, c’est qu’on n’a pu l’éviter, tandis que dans le second, pour peu qu’on ait la certitude que l’ennemi bien loin de rechercher lui-même les grandes solutions les redoute au contraire, si peu ou point défendue que soit une province, on est en droit