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des exemples.

de prudence, de sagesse et de circonspection, tandis qu’il en est d’autres qui font de ce général la personnification de la faiblesse de caractère et de l’indécision. C’est ainsi encore que l’on considère le passage des Alpes noriques par Bonaparte en 1797, tantôt comme un acte d’admirable résolution, et tantôt comme un monument de folle témérité. C’est ainsi, enfin, que la défaite stratégique des Français en 1812, en Russie, est attribuée par les uns à l’exagération, et par les autres à la défaillance de l’énergie de leur chef. Chacune de ces opinions a ses adeptes, et cela s’explique, en ce sens que, dans chacune d’elles, on se représente autrement la manière dont les choses se sont enchaînées, et, cependant, par le fait même qu’elles se contredisent, il est certain que, si les unes sont vraies, les autres sont nécessairement fausses.

L’excellent Feuquières a droit à toute notre reconnaissance pour les nombreux exemples qu’il a consignés dans ses mémoires. En procédant de la sorte, il a non seulement sauvé de l’oubli une quantité d’événements historiques qui, sans cela, ne nous seraient jamais parvenus, mais, en outre, et pour le moins dans toutes les circonstances où les faits relatés appuient et précisent réellement la conception théorique abstraite, il est très utilement arrivé à rapprocher celle-ci de la vie pratique. Quoi qu’il en soit, néanmoins, pour tout lecteur impartial, il n’est que très rarement parvenu à faire la preuve des vérités historiques, seul résultat, cependant, qu’il se proposât d’atteindre en agissant ainsi. En effet, bien qu’il entre parfois dans le détail des circonstances, il s’en faut de beaucoup que les conséquences qu’il déduit des événements ressortent logiquement de la manière dont ceux-ci s’enchaînent les uns aux autres.

La méthode, qui consiste à effleurer légèrement les exemples historiques, présente encore ce désavan-