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de la théorie de la guerre.

Lorsqu’une armée se laisse surprendre de telle sorte, qu’elle se trouve paralysée et dans l’impuissance absolue de tirer parti de ses dispositions et de ses moyens, l’effet de la surprise ne saurait être douteux. — La théorie ayant établi en axiome que, sur le champ de bataille, une attaque enveloppante conduit à un résultat plus considérable mais moins certain, chaque fois que l’on a à examiner une opération de cette nature, il faut tout d’abord se demander quel était le but que celui qui a ordonné l’opération s’est proposé d’atteindre en y recourant. En effet, s’il n’a agi ainsi qu’en vue de la grandeur du résultat, il a bien et légitimement choisi son moyen, tandis que, si, sans y être autorisé par des circonstances spéciales, il n’a cherché par là qu’à augmenter ses chances de succès, il a méconnu la nature même du procédé et commis une faute.

Dans ces circonstances, de même que dans toutes celles où l’on s’en tient aux effets et aux buts les plus rapprochés, la recherche et l’appréciation critiques ne présentent pas de difficultés. Or il en peut toujours être ainsi lorsque, faisant arbitrairement abstraction de l’enchaînement général des événements, on se contente de les considérer à ce point de vue restreint. Mais à la guerre, de même que dans toutes les branches de l’activité humaine en général, toutes les parties dont l’ensemble constitue un tout se tiennent en connexion intime les unes avec les autres, de sorte qu’il n’est pas de cause, si petite qu’elle soit, dont les effets ne se prolongent jusqu’à la terminaison de l’acte de guerre et n’en modifient quelque peu le dernier résultat, et pas de moyen, petit ou grand, dont l’action ne s’exerce jusqu’au but final. On peut donc suivre les effets d’une cause aussi longtemps que les phénomènes qu’elle produit paraissent encore dignes d’intérêt, et, non seulement examiner un moyen en vue du but auquel il con-