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méthodisme.

On voit ainsi que moins le grade de celui qui dirige l’action est élevé, et plus l’emploi de la méthode devient fréquent et indispensable, que cet emploi diminue de fréquence, par contre, à mesure que le grade s’élève, et qu’il disparaît enfin complètement dans les positions les plus élevées. C’est encore là une des raisons qui font que l’on a plus souvent recours à la méthode dans la tactique que dans la stratégie.

Dans sa plus large acception, la guerre n’est pas un agrégat d’un nombre infini de petits événements, qui se comportent de telle sorte les uns envers les autres dans leurs variétés, que l’on puisse mieux ou moins bien les dominer en y appliquant une méthode meilleure ou pire, mais elle est un ensemble de grands événements d’importance capitale et décisive, et dont chacun demande à être isolément traité. Elle ne ressemble pas à un champ de blé dont, avec une seule et même faux, on peut abattre tous les épis sans tenir compte de la forme particulière de chacune de leurs tiges, mais on la peut comparer à une forêt, aux grands arbres de laquelle le bûcheron ne peut appliquer la cognée, qu’après avoir soigneusement reconnu quelle est la complexion et la direction de chacun de leurs troncs.

On conçoit naturellement que ce soit d’après la nature des choses, et non pas précisément d’après la position occupée par le chef dans l’ordre hiérarchique, qu’il faille déterminer le degré auquel le méthodisme peut atteindre dans l’activité guerrière, et que, s’il s’impose moins tyranniquement dans les positions les plus élevées, c’est uniquement parce que c’est à ces positions que correspond l’activité la plus étendue. Un ordre de bataille constant, une organisation invariable des avant-gardes et des avant-postes sont des méthodes par lesquelles un général en chef lie non seulement les mains à ses sous-ordres, mais se les lie à lui-même aussi dans