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l’offensive.

vés à l’ennemi soit comme impression morale, jamais l’opération ne produira des effets comparables à ceux d’une victoire remportée dans une bataille générale.

Il importe de se bien pénétrer de l’ensemble de ces résultats afin de ne pas se promettre de ce genre d’opérations plus qu’elles ne peuvent donner. Bien des gens leur accordent une extrême efficacité dans l’action de l’offensive. C’est une erreur absolue, nous le montrerons plus tard et l’expérience le prouve.

La surprise des cantonnements de Duttlingen en 1643 par le duc de Lorraine, surprise dans laquelle un corps de 16 000 Français commandés par Ranzau perdit son général et 7 000 hommes, est l’une des plus brillantes que l’histoire relate. Ce fut une défaite complète causée par l’absence de tout avant-poste.

La surprise de Turenne à Mergentheim (Mariendal) en 1644 eut aussi les conséquences d’une véritable défaite, car, sur 8 000 hommes, les Français en perdirent 3 000 pour s’être engagés dans un combat intempestif après avoir effectué leur concentration. Mais ici le résultat a bien moins dépendu de la surprise proprement dite que de la manière irréfléchie dont la lutte fut engagée. On ne saurait donc conclure de cet exemple à la possibilité d’obtenir fréquemment un pareil succès. Turenne, en effet, eut particulièrement pu éviter le combat et se concentrer plus en arrière en dirigeant ses forces sur un point éloigné de ses cantonnements.

Parmi les surprises célèbres on cite encore celle que Turenne exécuta en 1674 contre les Alliés réunis en Alsace sous le grand Électeur, le général impérial Bournonville et le duc de Lorraine. Les trophées furent peu considérables dans cette affaire, car, des 50 000 hommes dont se composait leur armée, les Alliés en perdirent à peine deux ou trois mille, et cependant ils ne crurent pas pouvoir continuer la résistance en Alsace