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le plan de guerre.

faudrait conclure qu’ils ne nous ont pas compris, ou même, pour dire notre pensée tout entière, qu’ils ne comprennent pas la guerre dans ses rapports généraux. L’étude spéciale que nous avons faite de chacun de ces objets dans les livres précédents nous a conduit à reconnaître qu’ils exercent en général beaucoup moins d’influence qu’on ne le croit d’habitude. Cette influence ne pouvant que s’affaiblir encore à mesure que le but de la guerre devient plus considérable, elle devient absolument nulle lorsqu’il s’agit du renversement absolu de l’adversaire.

Nous nous réservons de consacrer à la fin de ce livre un chapitre spécial à l’organisation du commandement supérieur[1].


Nous terminerons cette étude par un exemple.

Si, ainsi que cela s’est déjà maintes fois réalisé depuis 150 ans, la Russie restant neutre, l’Autriche, la Prusse, la Confédération germanique, les Pays-Bas et l’Angleterre se coalisaient contre la France, dans cette guerre ces puissances seraient en situation de viser, au renversement de l’adversaire. Quelles que soient la grandeur et la force de la France, dans de pareilles conditions, elle peut se trouver réduite à des ressources insuffisantes, avec la moitié de son territoire envahi et sa capitale aux mains de l’ennemi, sans qu’aucune puissance, à l’exception de la Russie, soit en état de lui venir en aide. L’Espagne, en effet, est trop éloignée et trop mal préparée, et l’Italie trop faible et trop divisée.

La France possède à elle seule 30 millions d’habitants, mais la population des puissances qui se coalise-

  1. Le général de Clausewitz n’a pu réaliser ce projet, et le présent chapitre est le dernier de la Théorie de la grande guerre.