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la défensive.

Le centre de gravité d’une masse est là où se trouvent réunies la plus grande quantité des molécules qui la constituent, et le déplacement du centre de gravité entraîne celui de la masse entière. Il en est de même du centre de gravité des forces à la guerre. Qu’il s’agisse de l’armée d’une seule puissance ou des armées réunies de plusieurs puissances alliées, les forces militaires de toute partie belligérante présentent une certaine unité et, par suite, une certaine cohésion. Or, partout où il y a cohésion, la théorie du centre de gravité est applicable. Il existe donc, parmi ces forces armées, certains centres de gravité aux mouvements et à la direction desquels les autres points restent invariablement soumis, et ces centres de gravité se trouvent là où les forces armées sont réunies en plus grandes quantités. Or, à la guerre comme en mécanique, la force de l’action contre le centre de gravité doit être calculée en raison de la cohésion des molécules, et, si le choc est plus fort que la résistance ne l’exige, le coup porte en partie en l’air et il y a dépense inutile de force.

Nous appellerons ici incidemment l’attention sur la différence qui ne peut manquer de se produire entre la consistance d’une armée conduite par un chef unique sous une seule et même bannière, et celle d’une force armée coalisée composée de contingents de nationalités diverses, et dont, souvent, les différentes bases d’opérations se trouvent extrêmement éloignées les unes des autres. Dans le premier cas, la cohésion et l’unité peuvent être portées à leur plus haut degré, dans le second, l’unité n’existera souvent que dans l’objectif politique commun, et la connexion, toujours faible, sera, parfois, tout à fait illusoire.

Mais revenons à notre sujet. On voit qu’il faut ici éviter toute exagération, car si, d’un côté, la puissance que l’on veut donner au choc exige une grande concen-