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la défensive.

s’étaient maintenues jusqu’alors. C’est cet accroissement incessamment progressif de l’élément de la guerre, qui, en raison des énormes effectifs des armées modernes, a tout d’abord conduit au système actuel des réquisitions, puis au service obligatoire général et à l’emploi de la landwehr, et qui paraît enfin mener, comme dernière conséquence, à l’armement en masse des populations ou appel du landsturm. Or, de même que toutes les nations ont été entraînées à suivre l’exemple de celle d’entre elles qui, sortant la première des anciennes limites conventionnelles, a su tirer un si puissant parti des réquisitions et des gros effectifs, il est certain que si l’armement général des populations produit un jour quelque part de bons résultats, cette organisation sera aussitôt adoptée par toutes les puissances. Il paraît, d’ailleurs, tout d’abord logique de supposer que la puissance qui, la première, saurait faire un emploi opportun de ce nouvel élément de force, en tirerait une supériorité relative réelle sur un adversaire qui aurait négligé d’y avoir recours. S’il doit en être véritablement ainsi, nous laissons aux philosophes le soin et le souci de résoudre la question de savoir si cet accroissement de puissance de l’élément de la guerre sera, dans ses suites, utile ou nuisible à l’humanité. Ils ont souvent envisagé la guerre elle-même à ce point de vue. Nous continuerons donc notre étude sans nous arrêter à ce côté de la question.

Ce serait faire une objection sans portée que de prétendre que, en les employant autrement, la défense pourrait généralement tirer un meilleur parti des forces que lui procure la participation armée de ses populations à la guerre. Ce ne sont pas là, en effet, pour la plupart, des forces indifféremment disponibles, c’est-à-dire que l’on puisse à volonté transporter d’un objet sur un autre. Il en est même une notable partie,