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la défensive.

fois plus nombreux que les Russes ; dans la seconde, au contraire, leur infériorité numérique était sensible. La force d’impulsion de Bonaparte fut d’abord si puissante qu’elle le conduisit d’un bond jusqu’à Moscou, à 89 milles (592 kilomètres) au delà de Dryssa, tandis que, lorsqu’il dut quitter Moscou, il put à peine s’en éloigner, sans arrêt, d’une journée de marche. Enfin, de Dryssa au Niémen, la ligne de retraite des Français eût à peine atteint 30 milles (222 kilomètres), tandis qu’ils en eurent 112 (828 kilomètres) à parcourir pour, de Moscou, parvenir au même fleuve.

On voit quelle insigne folie c’eût été d’appliquer, au début de la campagne, un procédé défensif qui, judicieusement mis plus tant en œuvre, a produit de si grands résultats.

Comme l’action sur la ligne de retraite, lorsqu’elle n’est pas une simple démonstration, devient une attaque formelle, tout ce qui reste à dire à ce sujet trouvera sa place dans le livre où nous traiterons de l’offensive. Nous nous arrêterons donc ici, nous contentant d’avoir indiqué les conditions favorables dans lesquelles on peut recourir à ce mode de réaction.

Mais, lorsque l’on parle d’action sur les flancs, on est généralement plus porté à traiter le sujet au point de vue démonstratif qu’au point de vue absolu, en y attachant la seule idée de contraindre ainsi l’ennemi à la retraite. Si, comme on pourrait le croire au premier coup d’œil, l’intention d’atteindre à la réalisation parfaite de cet objectif présidait à chaque démonstration effective, les conditions que nous avons indiquées comme nécessaires à ce procédé défensif s’appliqueraient rigoureusement à sa forme démonstrative. Mais il n’en est pas ainsi, et nous verrons, dans le chapitre qui traitera spécialement des démonstrations, qu’elles sont régies par des conditions quelque peu différentes.