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la défensive.

incursions des Tartares. Toutes les lignes et organisations défensives que les États européens ont élevées sur celles de leurs frontières qui les séparent de l’Asie et de la Turquie ont un but semblable. Dans ces contrées, l’emploi du cordon est logique ; il ne constitue pas, sans doute, un obstacle absolument infranchissable, mais il rend les incursions plus difficiles et par conséquent plus rares, et, comme on se trouve là en contact avec des populations presque incessamment en état de guerre, cela a une véritable importance.

Quant aux lignes défensives auxquelles certains États européens ont eu recours pendant les guerres modernes, elles se rapprochent beaucoup aussi de cette signification. Telles sont, par exemple, les lignes hollandaises et celles que les Français établirent vers le Rhin. On se proposa uniquement, en les élevant, de mettre le pays à l’abri des incursions que fait habituellement l’ennemi pour se procurer des vivres et lever des contributions. Ces lignes n’ont donc d’autre destination que de permettre de résister, avec des forces peu nombreuses, à des opérations secondaires de l’attaque. Il va de soi, cependant, que si l’armée envahissante s’y porte en masse, le défenseur est aussitôt contraint d’y placer le gros de ses forces, ce qui le met dans les conditions défensives les plus défavorables. Pour cette raison tout d’abord, puis parce que la protection qu’elles offrent contre les incursions de l’ennemi ne compense pas, dans les guerres à durée limitée des nations civilisées, le défaut qu’elles présentent d’imposer parfois une dépense exagérée de forces, ces lignes sont aujourd’hui considérées comme un mauvais instrument défensif. Plus est grande l’énergie avec laquelle la guerre se poursuit, et plus ce moyen devient inutile et dangereux.

Il convient encore de considérer comme de vrais cordons toutes les lignes d’avant-postes très étendues que