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la défensive.

d’un pont, puis l’attaquant qui, sur un cours d’eau, commencerait par transborder, au moyen d’une partie de ses bateaux, la quantité de troupes nécessaires à la protection de ses travaux, n’a, quand il s’agit d’un marais, aucun moyen similaire à sa disposition. De simples planches, il est vrai, et c’est le procédé le plus facile, peuvent servir au passage de l’infanterie, mais cette opération est beaucoup plus longue qu’un transbordement par bateaux, et la mission de porter les premières troupes d’une rive sur l’autre croît encore en difficulté, lorsque le marais est traversé par une rivière qui exige elle-même l’établissement d’un pont. De simples planches peuvent bien, en effet, supporter le poids d’hommes isolés, mais ne sauraient se prêter au transport du lourd matériel d’un équipage de pont. Dans maintes circonstances cette difficulté peut être insurmontable.

La seconde particularité, moins favorable à la défense, est que, contrairement à ce qui est réalisable sur les cours d’eau, on ne peut, dans les marais, détruire entièrement les moyens de passage préexistants. On fait sauter un pont, en effet, tandis qu’on ne peut que percer les digues, ce qui ne signifie pas grand’chose en somme. La rupture des ponts établis sur un cours d’eau qui traverse un marais ne constitue même pas, pour l’attaque, une difficulté comparable à celle que lui cause la rupture d’un pont sur une rivière considérable.

Il résulte de ces deux particularités que, pour tirer parti d’un marais il faut tout d’abord en solidement occuper, puis en vigoureusement défendre les digues. On en est ainsi réduit à la défense locale, mais ce procédé défensif se trouve ici extrêmement simplifié par la difficulté que rencontre l’attaque à procéder au passage autrement que sur les digues elles-mêmes.

La défense des marais est donc foncièrement locale