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la défensive.

corps ainsi obtenu, on fixe l’effectif de chacun de ceux-ci, et il ne reste plus qu’à comparer cet effectif avec celui des troupes que, par des moyens auxiliaires, l’ennemi pourra jeter d’une rive sur l’autre pendant l’établissement du pont, pour savoir si l’on sera en mesure de faire une heureuse résistance.

Il faut admettre, en principe, que le passage sera impossible si la défense est en situation d’opposer à l’ennemi des forces très supérieures, doubles environ de celles qu’il parviendra à jeter d’une rive sur l’autre pendant le temps qu’exigera l’établissement du pont.

Prenons un exemple. Supposons que l’ennemi ait besoin de vingt-quatre heures pour établir son pont, et que, pendant ce laps de temps, il soit hors d’état, au moyen du matériel seul dont il se fait suivre, de jeter plus de 20 000 hommes sur la rive opposée. Si le défenseur est en mesure, par suite des intervalles que son objectif général lui a permis de donner à ses différents corps, de porter le même nombre d’hommes en moitié moins de temps, soit en douze heures, sur n’importe quel point du cours d’eau, le passage sera nécessairement irréalisable. Dans de semblables données, en effet, 20 000 hommes de la défense apparaîtront toujours sur le point menacé, avant que plus de 10 000 hommes de l’attaque aient pu passer d’une rive sur l’autre. Or comme, y compris le temps nécessaire à la transmission des avis, les corps en marche peuvent faire 4 milles (30 kilomètres) en douze heures, dans l’exemple que nous venons de choisir, le défenseur doit être en mesure de placer, le long du cours d’eau, des corps de 20 000 hommes à 8 milles (60 kilomètres) de distance les uns des autres, ce qui, pour une étendue de 24 milles (180 kilomètres) de rives, exige un effectif général de 60 000 hommes.

Dans de pareilles conditions, la défense sera toujours