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chap. xiii. — des cantonnements.

Si au contraire l’avant-garde ne pouvait être portée qu’à un mille (7 kilomètres 1/2) en avant des cantonnements, ces derniers ne devraient alors couvrir qu’une surface de quatre milles carrés (220 kilomètres carrés). Or, bien que le gain de temps que procure la résistance de l’avant-garde ne diminue pas proportionnellement aussi vite que la distance à laquelle elle est placée de l’armée, et qu’ainsi couverte à 1 mille cette dernière puisse encore compter sur 6 heures pour effectuer sa concentration, il convient cependant d’être d’autant plus prudent que l’on se trouve si rapproché de l’ennemi. Une armée de 50 000 hommes ne pourrait d’ailleurs être cantonnée sur un espace si restreint, que là seulement où la population serait très dense.

On voit ainsi quel rôle capital les grandes villes jouent dans la question, en ce que seules elles permettent de loger de 10 000 à 20 000 hommes à peu près sur un même point.

On peut conclure de ce résultat que lorsque l’on n’est pas très rapproché de l’ennemi, alors bien qu’il soit lui-même en ordre concentré, on peut, avec une avant-garde suffisante et convenablement placée, rester encore en cantonnements, comme le firent d’ailleurs Frédéric le Grand au commencement de 1762 à Breslau et Bonaparte en 1812 à Witepsk. Cependant, alors même que par suite des bonnes dispositions que l’on a prises et de l’éloignement dans lequel on se trouve d’un adversaire en ordre concentré on est absolument certain de pouvoir effectuer sa propre concentration en temps utile, il convient de ne pas perdre de vue que pendant toute la durée des mouvements à marche forcée que l’armée devra faire pour se réunir, elle sera absolument hors d’état d’entreprendre quelque autre opération que ce soit, si nécessaire et si impérieuse que les circonstances en puissent rendre

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