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chap. x. — des marches.

tillerie, il s’écoulera treize heures entre le moment où la colonne se sera mise en marche et celui où elle se trouvera réunie sur la nouvelle position. Il n’y a certes pas là de perte de temps, et cependant dans cette supposition les 40 000 hommes de la colonne n’auront marché que sur une seule route. Or, lorsqu’on dispose d’une masse de troupes déjà si considérable, on est mieux en situation de rechercher et d’utiliser des chemins vicinaux plus éloignés de la route centrale, et par conséquent plus nombreux que lorsqu’il ne s’agit que de détachements plus faibles, ce qui permet de diminuer encore le temps nécessaire à l’accomplissement général de la marche. S’il fallait faire marcher, sur une seule et même route, un corps d’armée plus considérable que celui dont nous venons de parler, il ne serait plus indispensable, dans ce cas, d’en faire parvenir la totalité dans la même journée sur la position nouvelle, car aujourd’hui d’aussi grandes masses de troupes, loin d’engager l’action dès qu’elles se rencontrent, la remettent généralement au lendemain.

En exposant ces divers exemples, nous n’avons pas la prétention d’épuiser toutes les combinaisons qui se peuvent produire dans l’espèce ; nous cherchons seulement à nous bien faire comprendre et à faire voir, en nous appuyant sur l’expérience, qu’aujourd’hui, par suite de la direction que l’on donne à la guerre, les dispositions de mouvement n’offrent plus les difficultés qu’elles présentaient autrefois, et que les marches les plus promptes et les mieux calculées n’exigent plus l’aptitude spéciale et l’extrême connaissance topographique du terrain qui leur étaient indispensables à l’époque de Frédéric le Grand. De nos jours, facilitées par le fractionnement organique de l’armée, ces marches se font pour ainsi dire d’elles-mêmes ou, du moins, sans grande préparation. Autrefois les batailles se