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les forces armées.

ravant, ou négliger d’occuper des positions sur lesquelles il eût été jadis possible de se maintenir en y plaçant les troupes sous la tente. Il est certain qu’il en eût été ainsi si la guerre fût restée ce qu’elle était précédemment ; mais elle subit elle-même à cette époque une transformation générale si radicale, qu’il devint désormais impossible de tenir compte de conséquences aussi secondaires. L’élément de la guerre a pris et conservé depuis lors une si grande violence, son énergie a atteint de telles proportions, que les anciennes périodes régulières de repos ont nécessairement dû disparaître, et que les forces opposées, se précipitant désormais sans trêve ni merci dans l’action, en poursuivent la solution dans un élan que rien ne peut arrêter. Il ne saurait donc être question, aujourd’hui, du changement que dans les anciennes conditions la suppression des tentes eût pu apporter à l’emploi des troupes. De nos jours, lorsqu’il faut camper on campe là où le but et le plan général l’exigent, que ce soit à couvert ou à la belle étoile, et sans plus se soucier de l’état du terrain que des conditions de la saison ou de la température.

Nous nous occuperons plus tard de la question de savoir si la guerre conservera cette violence dans toutes les circonstances et dans tous les temps. Il est certain que si elle perd jamais de cette énergie, la suppression des tentes prendra aussitôt de l’influence sur sa direction. Nous doutons néanmoins que, même dans ce cas, on en revienne jamais à l’usage général de faire camper les troupes sous la toile, par la raison qu’une fois que l’élément guerrier a pris une carrière aussi vaste, il ne revient plus que très momentanément sur ses pas, et cela dans des circonstances et dans des conditions tout à fait particulières, pour reprendre bientôt sa marche en avant avec toute la violence qui lui est propre.