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les forces armées.

vrir les flancs de l’armée à une journée de marche, c’est-à-dire à 6 ou 8 lieues, par des corps composés de trois à quatre divisions. Ce mode de répartition des troupes en quatre ou cinq grandes fractions placées à des distances données les unes des autres, constitue une disposition stratégique générale rationnelle et pour ainsi dire automatique de l’armée, pour tous les cas où des circonstances particulières n’imposent pas de mesures absolument spéciales.

Mais, bien que ces grandes fractions de l’armée soient en état de combattre isolément et puissent en effet parfois s’y trouver contraintes, il ne faut pas conclure que ce soit là le but unique ou principal de cette répartition. La difficulté d’assurer la subsistance des troupes sur le terrain nécessairement restreint qu’elles occupent est toujours grande, et cette difficulté ne fait qu’augmenter avec le temps. Cette considération suffit donc seule, bien souvent, à imposer un mode de fractionnement par lequel on arrive à répartir l’armée sur un espace plus étendu, sans néanmoins compromettre sa sécurité. D’ailleurs, ces conditions exclusivement stratégiques de l’existence journalière des troupes, de leur entretien et de leur cantonnement en dehors du combat, disparaissent aussitôt que l’action tactique entre en jeu. Dès qu’un engagement est imminent, les motifs d’une formation fractionnée cessent d’exister, et l’armée se concentre pour toute la durée de la bataille. À l’approche de l’ennemi, les précautions qu’imposait la nécessité de l’observer sur le front et sur les ailes, ainsi que les mesures prises pour arrêter la rapidité de ses opérations, ont atteint leur but. Tous les efforts se tournent dès lors uniquement vers la grande unité de la bataille ; il faut vaincre, il ne s’agit donc plus que de combattre. Le meilleur argument de la valeur de la répartition des troupes dans leur dispo-