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le combat.

quelques réserves encore fraîches pour l’arrêter net à la première coupure insignifiante du terrain.

Le deuxième procédé est déjà plus efficace, car à moins qu’il ne se rencontre une position forte sur laquelle l’ennemi puisse se reformer et établir son arrière-garde, une avant-garde composée de toutes armes est en situation de le malmener tant qu’elle se sent à portée d’être soutenue, c’est-à-dire, en général, pendant une ou deux heures au moins.

Le troisième procédé est naturellement de beaucoup le plus puissant, et tant que les forces de l’armée victorieuse lui permettent de prolonger la poursuite, sur ses moindres dispositions d’attaque ou de mouvement tournant, l’armée battue abandonne successivement la plupart des positions favorables qu’elle rencontre dans sa retraite et sur lesquelles elle fait tout d’abord mine de vouloir résister.

Nous avons dit que quelle que soit la vigueur de la première poursuite, l’arrivée de la nuit y met habituellement fin. Ce n’est que dans les plus rares circonstances que l’action prenant une exceptionnelle énergie se prolonge jusqu’au jour suivant. Quand on réfléchit à la part qu’il faut toujours abandonner au hasard dans les combats de nuit, on comprend facilement que le vainqueur redoute d’aventurer ses forces dans l’obscurité, alors que depuis l’issue de la bataille il n’a encore que si sommairement pu y rétablir l’ordre et en régulariser la marche. Dans ces conditions, en effet, à moins de la vertu guerrière la plus éprouvée dans les troupes victorieuses et d’une grande désunion dans l’armée battue, il y aurait témérité folle à continuer la poursuite. Dans la règle et alors même que la bataille ne s’est décidée que fort tard dans la journée, l’arrivée de la nuit arrête donc l’élan du vainqueur et permet au vaincu soit de se rallier immédiatement et de se re-