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CHAPITRE VII.

du moment décisif dans le combat.


Bien qu’il se présente dans le combat des moments qui exercent une extrême influence sur son issue, la décision n’en est jamais instantanée, et la défaite ne s’y accuse que graduellement. Cependant, et bien qu’il n’y ait pas de moment absolument décisif en soi dans le combat, il arrive toujours un instant où, quelque durée que puisse encore avoir la lutte, l’issue n’en saurait désormais être changée. Il est fort important, dans l’insuccès, de savoir reconnaître cet instant, car, dès lors, tout nouvel effort est vain, le combat est décidé, et toute troupe de renfort engagée pour le rétablir est inutilement sacrifiée.

Dans maintes circonstances on a ainsi cherché, au moyen de forces fraîches, à retourner une décision déjà irrévocable ; dans maintes autres, au contraire, on a négligé de continuer la lutte alors qu’on le pouvait encore très opportunément faire.

La journée du 14 octobre 1806 fournit deux exemples frappants à ce propos.

À Iéna le prince de Hohenlohe ayant accepté la bataille malgré l’infériorité numérique des troupes dont il disposait, les 60 000 ou 70 000 hommes de Bonaparte battirent si complètement les 35 000 combattants qui