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chap. iv. — du combat en général.

Dans la victoire :

1o  Une perte en forces physiques, et

2o  Une perte en forces morales, l’une et l’autre inférieures aux pertes éprouvées par le vaincu ;

3o  La constatation de la supériorité par la conservation du champ de bataille.

Et dans la défaite :

1o  Une perte en forces physiques, et

2o  Une perte en forces morales, l’une et l’autre supérieures aux pertes éprouvées par le vainqueur ;

3o  L’aveu de l’infériorité par l’abandon du champ de bataille.

Or les rapports envoyés de part et d’autre sur les pertes en tués et blessés étant toujours inexacts, rarement sincères, et souvent remplis d’altérations intentionnelles, et les pertes morales n’ayant guère de mesure appréciable, il en résulte qu’à moins que le nombre des prisonniers et des canons enlevés à l’ennemi pendant le combat n’indique clairement quel en a été le résultat, le gouvernement et l’opinion publique des États belligérants ou intéressés à la guerre ne peuvent, le plus fréquemment, attribuer la victoire qu’à celui des deux adversaires qui, en fin de compte, est resté en possession du champ de bataille.

Dans maintes circonstances cependant, et alors même que la lutte a été opiniâtre, le retrait des troupes du terrain sur lequel on les a fait combattre n’implique ni l’aveu de la supériorité reconnue de l’ennemi ni le renoncement au but poursuivi. C’est ainsi, par exemple, que l’on voit des avant-postes, après avoir vaillamment résisté sur un point, l’abandonner sans manquer par là à leur mission ; c’est ainsi encore que se produisent des retraites préméditées dans lesquelles on ne cède le terrain qu’en en défendant pied à pied toutes les posi-