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le combat.

plus pour ainsi dire que des scories, on les retire et on les remplace par des forces fraîches.

Ainsi conduite, la bataille se poursuit à une allure modérée comme se consume une masse de poudre humide, et lorsque la nuit impose le repos, parce que des deux adversaires aucun ne veut agir en aveugle, on fait de chaque côté l’estimation des forces dont on dispose encore, de celles que l’on suppose rester à l’ennemi, du terrain que l’on a gagné ou perdu et de la sécurité que présentent encore les derrières de l’armée. De cette estimation et de l’opinion que le général en chef s’est faite de l’énergie ou de la faiblesse dont il a perçu, de part et d’autre, les indices pendant l’action, résulte une impression générale unique d’où jaillit la résolution d’évacuer le champ de bataille ou de recommencer la lutte au point du jour.

Telle est, dans l’offensive comme dans la défensive, non pas la peinture achevée, mais l’esquisse de la bataille moderne, et les traits particuliers qu’y introduisent la nature du sol et le but poursuivi n’en modifient pas sensiblement le ton.

Or ce n’est pas par accident qu’il en est ainsi, mais bien parce que les nations civilisées en étant à peu près toutes arrivées au même degré d’organisation et d’instruction militaires, l’élément de la guerre attisé par les grands intérêts qui se trouvent aujourd’hui en jeu, a enfin brisé les limites conventionnelles qu’on lui imposait jadis, et donné carrière aux allures de rudesse et d’impétuosité qui lui sont propres.

Il nous faudra revenir à cette idée générale de la bataille moderne chaque fois que nous aurons à déterminer la valeur de l’un quelconque des différents facteurs de l’action à la guerre, tels que le terrain, le nombre, etc., etc., etc. Nous devons ajouter d’ailleurs, que nous n’avons en vue, ici, que les batailles et autres