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claudine à l’école

glace, il a l’air d’un gars solide qui ne doit pas vous rater.

— Grande sale, va !

Et nous poursuivons le déménagement du grenier ; c’est un enchantement de farfouiller dans cet amas de livres et de journaux à emporter, qui appartiennent à Mlle Sergent. Bien entendu, nous feuilletons le tas avant de les descendre et je constate qu’il y a là l’Aphrodite de Pierre Louys avec de nombreux numéros du Journal Amusant. Nous nous régalons, Anaïs et moi, émoustillées d’un dessin de Gerbault : Bruits de couloirs, des messieurs en habit noir occupés à chatouiller de gentilles danseuses d’Opéra, en maillot et en jupe courte, qui gesticulent et criaillent. Les autres élèves sont descendues ; il fait sombre dans le grenier, et nous nous attardons à des images qui nous font rire, des Albert Guillaume, d’un raide !

Tout d’un coup nous sursautons, car quelqu’un ouvre la porte en demandant d’un ton à l’ail : « Hé ! qui peut faire cet infernal tapage dans l’escalier ? » Nous nous levons, graves, les bras chargés de livres, et nous disons posément : « Bonjour Monsieur » maîtrisant une envie de rire qui nous tord. C’est le gros sous-maître à figure réjouie de tout à l’heure. Alors, parce que nous sommes de grandes filles paraissant bien seize ans, il s’excuse et s’en va en disant : « Mille pardons, Mesdemoiselles ». Et derrière son dos nous dansons silencieusement, en lui faisant des grimaces comme