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claudine à l’école

Malgré ce raisonnement remarquable, Mlle Lanthenay, impressionnée de sa propre paresse, me fait travailler sérieusement jusqu’à la fin de l’heure ; après quoi je la reconduis au bout de la rue. Il fait nuit, il gèle, ça me fait peine de voir cette petite ombre menue s’en aller dans ce froid et dans ce noir, pour rentrer chez la Rousse aux yeux jaloux.

Cette semaine nous avons goûté des heures de joie pure, parce qu’on nous employa, nous, les grandes, à déménager le grenier, pour en descendre les livres et les vieux objets qui l’encombraient. Il a fallu se presser ; les maçons attendaient pour démolir le premier étage. Ce furent des galopades insensées dans les greniers et les escaliers ; au risque d’être punies, nous nous aventurions, la grande Anaïs et moi, jusque dans l’escalier conduisant aux chambres des instituteurs, dans l’espoir d’entrevoir enfin les deux nouveaux sous-maîtres demeurés invisibles depuis leur arrivée…

Hier, devant un logis entre-bâillé, Anaïs me pousse, je trébuche et j’ouvre la porte avec ma tête. Alors nous pouffons et nous restons plantées sur le seuil de cette chambre, justement une chambre d’adjoint, vide, par bonheur, de son locataire ; nous l’inspectons rapidement. Au mur et sur la cheminée, de grandes chromolithographies banalement encadrées : une Italienne avec des