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LA REVUE DE PARIS

je ne me trompe, Tristan et les Maîtres Chanteurs. Il y a dans le drame une faille, une fracture. On dirait qu’arrivé au centre de son œuvre Wagner se soit ennuyé et n’ait pas eu envie d’aller plus loin. L’enthousiasme a disparu.

À gauche. — Il est certain que le troisième acte est une grande déception.

À droite. — J’ai été bien étonné quand je l’ai entendu. En lisant le poème et en regardant la partition je me disais cette rencontre de la déesse et du héros, ça doit être quelque chose de magnifique !

À gauche. — Tout d’abord nous ne sommes plus dans la tonalité wagnérienne. Tout ce qui est joie, allégresse, tendresse naïve, flambée claire et dévotion héroïque, lui est purement et simplement interdit. Comme disent les chanteurs, ça n’est pas dans sa voix. Les armatures de dièzes s’y opposent. Ces dièzes qui sont quelque chose comme l’éternel imparfait des romans de Flaubert.

À droite. — Et pas seulement ça ! mais examinez la situation en homme du métier, c’est un faux beau sujet. Un homme qui devient un Dieu, à la bonne heure ! Mais une déesse qui s’abandonne entre les bras d’un homme et qui quitte l’Alpe sublime pour devenir sa ménagère, c’est choquant et dégradant. C’est l’aventure de Louise de Saxe et du professeur Toselli. Wagner a senti cela, ça lui pesait sur le cœur, et toute l’excitation des deux correspondants comme on dit dans les procès de divorce anglais, sonne faux. On dirait un lendemain d’adultère avec la pension de famille zurichoise en perspective. Il n’y a qu’un bon moment dans la triste péroraison, c’est quand la Walküre vient rappeler le ciel à sa sœur déchue et qu’elle refuse dans un beau mouvement révolutionnaire. Là ce n’est plus Louise de Saxe, c’est la fille du général russe entre les bras du pharmacien nihiliste.

À gauche. — Et alors, en route pour la catastrophe !

À droite. — Hélas, hélas, trois fois hélas ! quelle route, quelle route pour y arriver ! À peine avons-nous quitté le Roc Ardent que la pluie commence. Vous savez, c’est comme les derniers jours des vacances quand le déluge engloutit tout le merveilleux territoire où nous avons si longtemps erré et rêvé. Avec la Goetterdaemmerung aux âges d’argent, de bronze et d’or