Page:Claudel - Connaissance de l’est larousse 1920.djvu/21

Cette page a été validée par deux contributeurs.

VILLE LA NUIT


Il pleut doucement, la nuit est venue. Le policier prend la tête, et, cessant de parler de l’époque où, marmiton lui-même dans le corps d’occupation, il vit le chef de bataillon installé dans le sanctuaire du Génie de la Longévité, il tourne à gauche. Le chemin que nous suivons est singulier : par une série de venelles, de passages, d’escaliers et de poternes, nous débouchons dans la cour du temple, qui, de ses bâtiments aux faîtes onglés, aux longues cornes angulaires, fait au ciel nocturne un cadre noir.

Un feu sourd émane du portique obscur. Nous pénétrons dans la salle.

L’antre est rempli d’encens, embrasé d’une clarté rouge ; on ne voit point le plafond. Une grille de bois sépare l’idole de ses clients et de la table des offrandes où sont déposés des guirlandes de fruits et des bols de nourriture ; on distingue vaguement le visage barbu du géant. Les prêtres, assis autour d’une table ronde,