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hourra ! — Nos cœurs sont très satisfaits. — Regardez mon ventre et mes cuisses.

Car, dans la fureur de la danse, elle dénoue, elle jette impatiemment sa ceinture, et, la robe toute ouverte, riante, criante, elle trépigne et bondit sur la peau élastique et tonnante qu’elle travaille de ses talons durs. Et quand ils virent son corps robuste et replet comme celui d’une petite fille, l’aise entra dans le cœur de tous et ils se mirent à rire. Le soleil n’est plus dans le ciel et cependant ce ne sont point des lamentations, ils rient ! Amaterasu les entendit et elle fut mortifiée dans son cœur, et ne pouvant surmonter sa curiosité, tout doucement elle entr’ouvrit la porte de sa caverne : « Pourquoi riez-vous ? »

Un grand rayon fulgurant traversa les dieux assemblés, il franchit le bord de la terre, il alluma la lune dans le ciel vide ; soudain l’étoile de l’aurore flamboya dans le ciel inanimé. Comme crève un fruit trop gros, comme la mère s’ouvre sous l’enfant qui fait force de la tête, voyez ! la terre aveugle ne peut plus contenir l’Œil jaloux, la cuisante curiosité du Feu placé dans le centre, la femme qui est le Soleil ! « Pourquoi riez-vous ? » — « O Amaterasu ! » dit Uzumé.

(Et tous les dieux en même temps dirent :