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d’un piano, au moment que les porteurs, m’ayant monté jusqu’au haut du perron, relèvent le rideau de ma chaise, j’aperçois dans le feu de ma lanterne, sous la pluie torrentielle, le magnolia tout pavoisé de ses gros lampions d’ivoire. Ô fraîche apparition ! ô confirmation dans la nuit du trésor indéfectible !


— Le thème de la Terre est exprimé par les détonations de ce distant tambour, ainsi que dans le cellier caverneux on entend le tonnelier percuter à coups espacés les foudres. La magnificence du monde est telle qu’on s’attend à tout moment à avoir le silence fracassé par l’explosion effroyable d’un cri, le taraba de la trompette, l’exultation délirante, l’enivrante explication du cuivre ! La nouvelle se propage que les fleuves ont renversé leurs cours, et, chargeant la veine dilatée de l’infiltration qui gagne, toute la batellerie de la mer descend dans le continent intérieur pour y négocier les produits de l’horizon. Le travail des champs bénéficie de la vicissitude ; les noriahs fonctionnent et confabulent, et jusqu’à ce que la moisson inondée mire mêlé à sa sombre prairie (une touffe quelque part passée dans l’anneau de la lune), le soir couleur de goyave, toute l’étendue est remplie de la rumeur hydraulique. (Autre part, à l’heure la plus éclatante, quatre amours liés à une canne à