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choit une fiente. Je suis bien où je suis. Mes démarches dans ce lieu clos sont empreintes de précaution et d’une vigilance taciturne et coite, tel que le pêcheur qui craint d’effaroucher l’eau et le poisson, s’il pense. Rien ici d’une campagne ouverte et libre qui distrait l’esprit en emmenant le corps ailleurs. Les arbres et les fleurs conspirent à ma captivité, et le repli cochléaire de l’allée toujours me ramène vers je ne sais quel point focal qu’indique, tel qu’au jeu de l’Oie, retiré au plus secret, le Puits ; ménagé à travers toute l’épaisseur de la colline, par le moyen de la corde qui fait l’axe du long goulot, j’agite le seau invisible. Tel qu’un fruit comme un poète en train de composer son sucre, je contouche dans l’immobilité cela au-dedans de quoi la vie nous est mesurée par la circulation du soleil, par le pouls de nos quatre membres et par la croissance de nos cheveux. En vain la tourterelle au loin fait-elle entendre son appel pur et triste. Je ne bougerai point pour ce jour. En vain du fleuve grossi m’arrive la rumeur grave.


— À minuit, revenant de ce bal, où pendant plusieurs heures je considérai des corps humains, les uns revêtus de fourreaux noirs, les autres de bizarres drapeaux, qui tournaient par couples (chaque figure exprimant une satisfaction incompréhensible), aux modulations gymnastiques