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L’ARCHE D’OR DANS LA FORÊT


Quand je quittai Yeddo, le grand soleil flamboyait dans l’air net ; à la fin de l’après-midi, arrivant à la jonction d’Utsonomiya, je vois que la nue offusque tout le couchant. Faite de grands cumulus amalgamés, elle présente cet aspect volumineux et chaotique qu’arrange parfois le soir, alors qu’un éclairage bas, comme un feu voilé de rampe, porte les ombres sur le champ nébuleux et accuse à rebours les reliefs. Sur le quai à cette minute assoupie et longtemps dans le train qui m’emporte vers l’Ouest, je suis le spectateur de la diminution du jour conjointe à l’épaississement graduel de la nue. J’ai d’un coup d’œil embrassé la disposition de la contrée. Au fond profondément d’obscures forêts et le repli de lourdes montagnes ; au-devant des banquettes détachées qui l’une derrière l’autre barrent la route comme des écrans espacés et parallèles. La terre, telle que les tranchées que nous suivons en montrent les couches, est