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quée à Saigon. — En camarades, bien entendu ; elle savait que monsieur de Fierce… mais d’ailleurs, elle-même se déclarait rangée des voitures ; elle se refaisait une virginité.

Mévil écrivit oui sur une carte.

— « Je n’en suis pas, dit Fierce assez fermement.

— Il est sage, ricana Torral, de fuir les tentations avant le mariage ; ça donne le droit d’y succomber après.

— Je ne peux pas m’exhiber à tout Saïgon avec ces actrices…

— … Dans la nuit noire, sur les routes désertes, au fond d’une voiture fermée. Tu ne peux pas c’est clair : Sélysette le saurait par son petit doigt. »

Le rideau s’était levé pour le troisième acte. Fierce regarda les chanteuses ; une curiosité lui venait ; la petite amie de Liseron, qui était-ce ? Il supposa la brunette qui jouait le travesti fille était fine et agaçante ; Liseron, — Petite Duchesse, — la frôlait très câlinement.

— « Si j’allais avec vous, dit-il en hésitant, il faudrait que Torral s’occupât clairement de cette petite…

— Je m’occuperai. Pauvre homme, va ! Tout ça pour souper avec deux femmes qui se disent redevenues pucelles !

— Partons tout de suite, fit Mévil ; nous attendrons à la porte des artistes, et Fierce se cachera dans la voiture. »

Sur la scène les deux femmes s’occupaient beau-