Page:Claude Farrère - Les civilisés, 1905.djvu/160

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il s’arrêta un instant.

— « Je l’épouserai, acheva-t-il.

— Tu es fou, dit Torral.

— Peut-être bien. »

Torral réfléchit.

— « Deux femmes qui ne veulent pas ! C’est beaucoup pour Saïgon. Tu as tout essayé ?

— Je n’ai rien essayé : je me cogne à un mur. Marthe me fait peur et me paralyse. L’autre a peur de moi et me ferme sa porte.

— Elle t’aime, alors.

— Ça m’avance bien ! »

Ils allumèrent des cigarettes. Mévil laissa la sienne s’éteindre.

— « Il y a d’autres femmes, conseilla l’ingénieur. Ici ou là, le spasme est pareil. »

Mévil hocha la tête,

— « Je ne peux pas. Parbleu oui, il y a des femmes ; — plus que je n’en veux ; — plus que je n’en puis prendre. — Tiens, en ce moment, on m’attend à Cholon, et si je suis à pied, c’est que je ne veux pas de cocher pour aller à ce rendez-vous, qui est une aventure discrète : une jeune fille…

— Ça m’est égal. Eh bien ?

— Eh bien, ce n’est pas celle-ci que je veux, ni les autres.

— Prends garde, dit Torral. Si tu en es là, c’est dangereux. »

Ils avaient marché jusqu’à la cathédrale. Ils s’arrêtèrent devant la porte.