Page:Claude Farrère - Les civilisés, 1905.djvu/129

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

solution réalisée admettait les séries et rejetait les intermittences. Ce qu’il fallait démontrer. »

Malais arrondit les sourcils. Torral, plus ironique, continua d’un ton de professeur :

« Corollaire : à la limite, c’est-à-dire dans l’éternité des siècles, n tend vers l’infini, 2n également, et la probabilité de l’hypothèse réalisée devient nulle. Donc cette hypothèse n’existe pas. Donc, on n’a jamais joué au poker : c’est une illusion…

— Hein ?

— Une illusion.

— Vous avez raison, dit Malais en haussant les épaules. Je ne comprends pas. »

Et il regarda le jeu. Au fond de la salle, l’horloge sonnait onze coups.

— « Messieurs, dit Abel, nous allons, si vous le roulez bien, faire les quatre derniers coups, car voici qu’il se fait tard. »

Personne ne protesta. Abel donna les cartes. Schmidt sépara de son panier quelques billets qu’il mit dans sa poche. Ariette, à petits coups d’œil successifs, sembla soupeser le gain de Fierce, projetant peut-être de se l’approprier.

Mais coup sur coup, Fierce gagna deux fois.

Ariette donna les cartes à son tour, — pour l’avant-dernière partie, — et fit un pot considérable. Schmidt effrayé abandonna. Abel et Fierce tinrent. L’avocat relança du double. Mais Fierce abattit un brelan d’as et gagna encore.

— « Chance insolente, » dit Malais.